Voitures salaires : un système coûteux et injuste

Voitures salaires : un système coûteux et injuste

20 octobre 2025 · Luc Goffinet

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Le système des voitures salaires, coûteux, écologiquement et socialement injuste, n’est toujours pas remis en question par le gouvernement belge. À l’heure où des économies budgétaires doivent être faites, cet énorme cadeau fiscal évalué entre 3 et 6 milliards € par an reste sous les radars. Ce sont pourtant là des moyens qui permettraient de ne pas devoir couper abusivement dans des dépenses sociales, culturelles ou de santé…

Voitures salaires : un système qui cloche

Il convient avant toute chose de distinguer la voiture de société, véhicule d’une entreprise destiné uniquement à un usage professionnel (la camionnette du plombier par exemple) et la voiture salaire, destinée aux employés dans le cadre de leurs déplacements professionnels et privés (vacances, loisirs …). Selon les chiffres officiels du SPF Mobilité le nombre de voitures salaires ne cesse d’augmenter :

Au premier trimestre 2025, le parc de véhicules comptait 627.000 voitures de société mises à disposition des travailleurs salariés. Ce nombre a plus que doublé en 15 ans : 15 % des salariés bénéficient d’une voiture de société, alors que ce pourcentage n’était que de 7,4 % en 2007. La part de ces voitures dans l’ensemble du parc de véhicules a également augmenté, passant à 9 % en 2025.

 

2024 SPF Voitures salaires (nombre)

© SPF Mobilité

Selon le Bureau fédéral du Plan, la perte liée de recettes fiscales de l’Etat a aussi augmenté depuis les dernières estimations :

Les estimations précédentes des pertes de recettes pour le gouvernement (y compris la sécurité sociale) allaient de 2 à 4 milliards. Ces estimations varient donc, même si tous les auteurs s’accordent sur l’ordre de grandeur. Notre analyse de sensibilité a montré que, selon les hypothèses retenues, les dépenses fiscales totales varient aujourd’hui de 3 à 6 milliards par an.

Le système des voitures salaires est aussi socialement injuste car il profite surtout aux 20% des salariés les mieux payés en Belgique, et majoritairement aux hommes. En outre, il dope littéralement l’utilisation de la voiture : une voiture privée roule en moyenne 14.000 km/an, contre 28.000 km/an pour une voiture salaire.

Diminuer les dépenses de l’État (tout en favorisant la transition)

Depuis longtemps, Avello et le Fietsersbond réclament une remise en question de ce système coûteux pour la collectivité. Des alternatives fiscales réalistes peuvent être mises en place pour rendre la mobilité plus juste, plus solidaire et plus efficace en termes d’enjeux climatiques et d’indépendance énergétique. Interrogés sur cette question par Avello lors des élections 2019, quatre partis francophones sur six s’étaient prononcés pour la fin du système actuel des voitures salaires. Du côté du MR et du cdH (maintenant « Les Engagés »), on disait vouloir conserver des voitures « basses émissions » dans le cadre de l’avantage fiscal actuel. Pour les autres partis, une sortie à terme du système de subsidiation des voitures était envisagée.

Dans la situation actuelle (économies budgétaires massives), il est important de remettre en question ce système qui pèse exagérément sur la dette publique. Avello rappelle aussi que les embouteillages et les effets de la pollution sur notre santé représentent également un coût non négligeable, et que les infrastructures cyclables de qualité sont moins onéreuses que des infrastructures (auto)routières. Avello s’étonne donc que, dans la situation actuelle, le système des voitures salaires ne soit toujours pas revu. Un système pourtant très coûteux pour l’ensemble de la société, très inégalitaire, et en inadéquation totale avec l’équilibre budgétaire que le pays prétend viser.